Pailhès (09) - Réhabilitation engagée d'une maison de village du XIXe siècle en bistrot de pays

Occitanie
Extension
Tertiaire
Pierre dure (grès, etc.)
Bâtiment situé dans un secteur protégé


 

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Cette maison d’habitation du XIXe siècle, en moellons de pierre, est située à Pailhès en Ariège (09) dans le périmètre du Parc naturel régional des Pyrénées Ariégeoises. Après son acquisition par la mairie de Pailhès, elle a fait l’objet d’une réhabilitation et reconversion patrimoniale exemplaire, récompensée par le label Haute Performance Energétique.

Le bâtiment et son contexte

Ce bâtiment d’habitation du milieu du XIXème siècle, est situé sur la place de l’église du village de Pailhès en Ariège (09). Inséré dans un îlot bâti dense, ce bâtiment bénéficie d’un emplacement privilégié pour la vie du village. Sa façade principale s’ouvre sur la place de l’église, avec une vue dégagée sur l’espace naturel de la rivière de la Lèze.

Comme la plupart des maisons de bourg en Ariège, qui sont mitoyennes au moins sur un côté, en alignement de rue, cette bâtisse est en mitoyenneté au nord, ce qui lui offre une protection face aux intempéries et vents dominants. Un jardin en friche était présent à l’ouest du bâtiment et une cour au sud.

En terme d’organisation, la partie de la bâtisse orientée est et ouverte vers la place du village, comprenait l’espace d’habitation, tandis que la partie arrière accolée à la maison au niveau du mur ouest, était une ancienne grange en briques, datant du XXe siècle, et probablement utilisée comme porcherie. La surface initiale de l’ensemble était de 165,5 m².

En 2007, la fermeture du seul hôtel-restaurant-bar du village met fin à une grande partie de la vie locale et à son attractivité touristique. La mise en vente de cette maison en 2012 apparaît comme une opportunité pour redynamiser ce village de 400 habitants.

Un droit de préemption (droit qui permet à une collectivité de devenir prioritaire pour l’achat d’un bien à la suite de sa mise en vente par son propriétaire dans un but d’intérêt public) a donc été utilisé en 2013 par le conseil municipal afin d’acquérir ce bien.

La présence du château de Pailhès (inscrit en 1997 à l’Inventaire des Monuments Historiques) à moins de 500 m de ce bâtiment implique que toute intervention, architecturale ou d’aménagement extérieur, reçoive l’avis favorable Architecte des Bâtiments de France.

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Figure 1 : Vue aérienne du village de Pailhès

Diagnostic avant travaux

Etat technique et sanitaire du bâtiment 

Avant l’acquisition du bâtiment par la mairie de Pailhès, l’étage avait été transformé en lieu associatif et accueillait un cabinet médical.

Le rez-de-chaussée était vétuste et le plancher bas situé au-dessus d’un vide sanitaire n’était plus adapté à un passage régulier.

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Figure 2 : Vue du bâtiment depuis la place de l'église avant les travaux (source : Barthélémy Dumons)

La maçonnerie est constituée de moellons en pierres issues de carrières de proximité, peu retravaillées. Les pierres sont hourdées au mortier de terre et de chaux. Un enduit à la chaux protégeait les élévations, coté extérieur avec une finition plâtre coté intérieur. Les parois, non isolées, mesurent environ 40 cm d’épaisseur et étaient dans un état satisfaisant ne nécessitant pas de réfection. Cette maçonnerie porteuse a une forte inertie thermique (déphasage de 11h) grâce à sa structure lourde. Ce type de maçonnerie en pierre brute est très courante au sein du département, aussi bien pour des édifices urbains que pour des bâtiments ruraux.

Des remontées capillaires ont été observées à la base des murs, l’humidité provenant de l’artificialisation des espaces extérieurs adjacents. L’humidité contenue dans le sol ne peut donc s’échapper qu’en passant par la base des murs, dégradant ainsi le bâti.
 

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Figure 3 : Maçonnerie de pierres apparentes une fois l'enduit retiré (source : Barthélémy Dumons)

Les combles, qui servaient de stockage, possèdent une grande hauteur sous plafond et étaient propres. L’état global de la charpente et des planchers était satisfaisant du fait d’une rénovation assez récente de la couverture durant laquelle les voliges abimées ont été retirées et les tuiles directement posées sur les liteaux.

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Figure 4 : Etat des combles avant travaux (source : Barthélémy Dumons)

Le plancher intermédiaire, composé d’un parquet bois posé sur des poutres et solives, était dans un état correct.

En revanche, les planchers bas étaient trop dégradés par l’humidité provenant du vide-sanitaire dont les grilles d’aération étaient très probablement bouchées. Ces planchers ont donc été déposés.

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Figure 5 : Etat du parquet situé sur le plancher intermédiaire avant travaux (source : Barthélémy Dumons)

État énergétique

Le bâtiment a une volumétrie compacte limitant les surfaces d’échange avec l’extérieur et donc les déperditions thermiques.
L’organisation intérieure du bâtiment découle de son implantation en alignement avec les autres bâtiments de la place. Le hall d’entrée formait un espace tampon et évitait ainsi une ouverture des pièces de vie directement sur l’extérieur.

Concernant l’isolation thermique du bâtiment, aucun des murs n’était isolé. L’épaisseur des murs, d’environ 40 cm d’épaisseur, contribue à l’inertie thermique du bâtiment avec un déphasage estimé à 11h.  

Les menuiseries d’origine étaient toutes en chêne et en simple vitrage.

Pour la ventilation, seules les fenêtres permettaient un renouvellement de l’air intérieur.

Une cheminée inutilisée subsistait dans la cuisine et une autre avait été détruite auparavant. Le chauffage des pièces se faisait occasionnellement avec des radiateurs électriques mobiles. Le réseau électrique du bâtiment était toujours fonctionnel malgré son état dégradé. La gestion de l’ECS se faisait avec un chauffe-eau électrique situé dans une salle d’eau à l’étage.

 

État patrimonial et architectural

Les éléments patrimoniaux remarquables

Cette bâtisse est caractéristique des maisons de village ariégeoises. Cette typologie présente comme spécificités[1] :

  • des façades constituées d’une à deux travées d’ouvertures sur deux à trois niveaux : un rez-de-chaussée, un étage et un comble ;
  • une façade recouverte d’un enduit, traditionnellement à la chaux et généralement clair (beige, ocre ou grisé). Le ton des enduits correspond à celui du sable des rivières locales ayant servi à leur réalisation. Quelque fois, des peintures et badigeons sont utilisés, notamment au niveau des encadrements, soubassements et chaînes d’angle ;
  • des combles éclairés par des ouvertures de plus petites dimensions ;
  • des ouvertures plus hautes que larges au niveau des étages courants et un comble éclairé et ventilé par des petites ouvertures de forme carrée.
  • des ouvertures à l’étage et au niveau du comble qui sont souvent pourvues de garde-corps, en bois ou ferronnerie ;
  • une porte en bois de composition simple, possédant parfois une imposte vitrée en bande haute.
  • des volets en bois pleins protégeant les ouvertures contre les intempéries et apportant de la couleur sur les façades, ce qui souligne les proportions des ouvertures.
  • un toit en croupe ou à deux pans, couvert en tuile canal ou mécanique ;
  • un toit débordant, présence de génoise.

 

 

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Figure 6 Représentation d'une maison de bourg ariégeoise - CAUE Ariège et PNR des Pyrénées Ariègeoises

 

Dans le cas précis du bâtiment de l’Estanquet de Pailhès, le nombre de travées, les encadrements, les dimensions et les proportions des ouvertures, la couverture en tuiles canal représentatifs du bâti traditionnel de l’Ariège constituaient des éléments qu’il était important de conserver. De plus, la présence d’encadrements de baies en bois au sein d’une architecture en pierre est la preuve d’un bâti relativement modeste qu’il fallait mettre en valeur. En effet, les encadrements en pierre, plus onéreux, étaient réservés à des classes plus aisées. La présence d’une génoise à simple rang sur la façade est, fait également partie des éléments patrimoniaux typiques.

 

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Figure 7 : Vue sur la génoise à simple rang sur la façade est

Les maçonneries de ces maisons de ville sont généralement réalisées avec des pierres et peuvent présenter des scories de bas-fourneaux (mélange de roche calcinée et de fer fondu). Les scories permettaient de renforcer la maçonnerie mais n’avaient pas de but décoratif. Sur le bâtiment de Pailhès, ces éléments étaient visibles dans l’enduit abimé des façades extérieures. Ils témoignent de la présence d’anciennes industries métallurgiques dans la région, et donc de l’utilisation de ces résidus de l’industrie du fer.

Projet de réhabilitation

Programme architectural et énergétique

Cahier des charges du maître d’ouvrage 

Le maître d’ouvrage est la commune de Pailhès, qui souhaitait donc répondre aux problématiques propres à son village et ses habitants. Tous les acteurs locaux ont été conviés à une réflexion commune sur la redynamisation du centre du village et à la nécessité de créer un pôle culturel et social sous la forme d’un « Bistrot de pays ».

D’autres consultations participatives ont permis d’en déduire les points clés :

  • Un lieu social, de rencontres intergénérationnelles et permettant le développement d’une vie associative.
  • De la vente de produits du terroir avec une part provenant de l’agriculture biologique, valorisant ainsi le circuit court.
  • Un lieu de restauration contenant ces mêmes produits cuisinés.
  • Un lieu disposé et accessible pour l’événementiel local.

 

 

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Figure 8 : Vue aérienne du projet

 

avant travaux

Figure 9 : Plans du RDC avant et après réhabilitation

 

 

Apres travaux

Figure 10 : Plans du 1er étage avant et après réhabilitation

 

 

Acteurs du projet 

Le projet a bénéficié d’une forte implication de l’équipe de maitrise d’ouvrage, notamment du maire de Pailhès, Yvon Lassalle, et de l’ensemble des élus locaux. Plusieurs réunions de concertations citoyennes ont été organisées avec les habitants, les représentants d’associations, les producteurs et les artisans, afin de faire émerger un projet contribuant à la revitalisation du centre de Pailhès et au maintien des filières locales.

Le maître d’œuvre est l’architecte Barthélémy Dumons, architecte du patrimoine, et la SARL Architecture et Paysage, ayant des expériences en réhabilitation du bâti ancien. Tous les artisans ayant participé à ce projet viennent de villages situés à moins de 40 km de Pailhès :

  • Charpentier ayant réalisé l’extension en bois et la charpente : Melchior Weirngartner à Varilhes.
  • Menuisier ayant réalisé l’escalier en bois local : Marc Banroques à Alzen.
  • Menuisier ayant réalisé le bar en bois local : David Rousse à Saint-Girons.
  • Menuisier ayant réalisé les portes, les fenêtres et le parquet en bois local : Jean-Pierre Eychenne à Sabarat.
  • Scieur ayant transformé l’intégralité du bois pour le chantier : Orion Wijnen à Gabre.

Il en est de même pour le bois de provenance locale (à moins de 30 km du lieu de réalisation) et la paille servant à l’isolation des murs. Les matériaux choisis pour cette réhabilitation sont majoritairement des matériaux biosourcés, recyclables et locaux, présentant une faible énergie grise. Les bois exotiques, le PVC et l’aluminium ont été exclus en raison de leur coût environnemental et de la présence de matières premières locales de grande qualité.

Dans le cadre de l’appel d’offre du projet et afin de créer un lot spécifique pour la fourniture, permettant d’avoir recours au bois local, il a été nécessaire de déterminer en amont les volumes de bois pour chaque lot (charpente, menuiseries, …) et d’en déduire le nombre de grumes nécessaires. Pour cela, le maître d’œuvre a bénéficié de l’accompagnement du Parc Naturel Régional des Pyrénées Ariégeoises en tant qu’assistant à maitrise d’ouvrage.

Ce lot « Grumes » a été créé et alloti par des entreprises locales avec du bois des forêts alentours.

Ainsi, une scierie mobile a pu être installée sur la place de l’église afin que chaque artisan puisse repartir avec la quantité de bois nécessaire aux travaux. Chaque lot récupéré a ensuite été séché au séchoir dans les locaux des artisans.

Le projet aura au total valorisé un volume de 79m3 de bois local et eu recours à différentes essences aussi bien des feuillus (chêne, acacia, frêne, peuplier, merisier, châtaignier) que des résineux (douglas). Cela représente approximativement un stockage carbone de 35 tonnes de CO2.

Les financeurs sont La Région Occitanie, le département de l’Ariège et le Fond National d’Aménagement et de Développement du Territoire (soutenu par l’état). Le restant est financé par la commune de Pailhès.

 

Projet et études réalisés 

Un diagnostic structurel a été effectué.

Une étude thermique a été réalisée afin de déterminer s’il était nécessaire de mettre du triple vitrage, mais cela s’est avéré inutile au vu des conditions climatiques de la région et de l’ambition énergétique du projet.

 

Synthèse 

Le programme de reconversion d’un ancien bâtiment d’habitation en lieu de vie associatif et de consommation comprend une réhabilitation et une extension.

Il s’agit là d’un projet :

  • Qui a fait l’objet d’une concertation citoyenne rassemblant (élus locaux, représentants d’associations, bénévoles, producteurs et artisans)
  • Privilégiant l’utilisation de matériaux locaux et biosourcés dans une logique de diminution de l’empreinte carbone, de valorisation des ressources et des savoir-faire du territoire. Le bois et la paille proviennent d’un périmètre de moins de 30 km autour du site.
  • Ayant eu recours à un marché alloti, avec notamment un lot spécifique pour la fourniture du bois, ce qui a permis à différents propriétaires forestiers et artisans de répondre au marché.
  • Réalisé par un maître d’ouvrage très impliqué dans la préservation du bâti ancien rural. Le maître d’ouvrage pris soin de mettre en valeur les éléments de ce type de bâti aux caractéristiques modestes, pour lequel l’enjeu patrimonial portait principalement sur les éléments extérieurs du fait de l’état initial de la bâtisse.

 

 

Travaux

Durée des travaux

Le chantier s’est déroulé de 2015 à 2017.

 

Structure

La charpente a été maintenue en l’état. La modification majeure apportée au bâtiment existant consiste en la création d’une grande ouverture vitrée sur la façade sud, donnant directement sur la cour où un espace de restauration est installé. Cette ouverture permet à la lumière naturelle d’éclairer les tables du rez-de-chaussée et celles situées au niveau de la mezzanine.

Pour cela, la moitié de la façade sud a été démolie, puis un encadrement en béton armé a été maçonné avec un linteau en bois posé en son milieu, permettant de délimiter l’ouverture vitrée et le premier étage.

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Figure 11 : Création de l'ouverture vitrée en façade sud, mise en œuvre de l'encadrement en béton armée et du linteau en bois au niveau intermédiaire

 

L’ensemble des cloisons internes et des planchers a été démoli pour créer des volumes et des pièces plus facilement adaptables à un Etablissement Recevant du Public (ERP) : salle de restauration, bar et sanitaires accessibles aux personnes à mobilité réduite, cuisine professionnelle, lieux de stockage.

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Figure 12: Intérieur de l'habitation à la suite du décloisonnement

 

L’ancienne grange en brique à simple pente a été démolie puis une extension en ossature bois de 44,5 m², double pente et bardage à lames verticales en acacia, chêne et mélèze brut du côté cour, a été construite sur son emprise.

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Figure 13 : Ancienne grange avant destruction

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Figure 14: Vue de l'extension avec bardage à lames verticales en acacia
et mélèze brut, depuis la cour extérieure après démolition de la partie en briques

 

Murs

La volonté première du maître d’ouvrage est un choix de matériaux respectueux de l’environnement biosourcés, d’origine locale et dont la mise en œuvre nécessite un véritable savoir-faire. Les matériaux privilégiés sont donc le chanvre, la ouate de cellulose, la paille et la laine de bois. Les enduits non perméables à la vapeur d’eau et non capillaires, comme ceux à base de ciment ou de résines synthétiques, ont donc été écartés afin de privilégier des enduits à la chaux permettant un meilleur équilibre hygrothermique et gestion de l’humidité des parois.

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Figure 15 Plans du rez-de-chaussée (source : Barthélémy Dumons)

 

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Figure 16 Plans de l'étage (source : Barthélémy Dumons)

Le mur nord étant mitoyen, il n’est pas en contact avec l’extérieur, mais avec un autre bâtiment probablement chauffé. Il a donc été décidé de ne pas l’isoler. Un enduit intérieur à pierre vues a été réalisé pour le mur nord, permettant de le mettre en valeur.

Pour tous les autres murs existants intérieurs en pierre, un enduit chaux-chanvre de 6 cm (R=0,85 K.m²/W) produit sur le chantier a été posé. Les enduits existants à l’extérieur ont été piqués puis remplacés par un nouvel enduit chaux.

 

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Figure 17 : Pose de l'enduit chaux sur la façade est (source : Barthélémy Dumons)

D’un point de vue patrimonial, le projet de réhabilitation a permis de :

  • préserver une partie des murs en moellons ;
  • préserver la toiture à deux versants, et débordant côté rue.
  • de mettre en œuvre un badigeon blanc au niveau des chaînages d’angles et un enduit dans un ton jaune ocre sur le reste des façades, permettant de restituer une polychromie typique. Les couleurs des décors, de la façade et du soubassement sont bien maintenues distinctes.

L’extension a été isolée grâce à un remplissage en paille locale de 37 cm (R=7,1K.m²/W) et un revêtement à la chaux pour les façades orientées ouest et nord. Quant à la partie sud avec bardage, elle a été isolée avec de la laine de bois sur 14 cm (R=4K.m²/W).

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Figure 18 : Installation de la paille d'isolation côté jardin de l'extension en ossature bois, sur la façade ouest de l’extension

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Figure 19 : Revêtement à la chaux du mur ouest isolé à la paille (source : Barthélémy Dumons)

 

À l’étage de l’extension se trouvera la future cuisine, tandis que le rez-de-chaussée accueillera une zone de stockage, des WC et un monte-charge reliant la cuisine à la salle de restauration. Du fait de la présence de la cuisine, le mur isolé à la paille est doublé par une plaque de plâtre coupe-feu de 30 minutes côté intérieur.

 

Plancher haut

Seul le plancher d’origine des combles a été conservé, cependant la pose d’une poutre de soutien en sous œuvre a été nécessaire et complexe. Elle permet de remplacer une ancienne poutre maitresse qui a été déposée.

Le plancher haut a été isolé avec 40 cm de ouate de cellulose (R=10,5 K.m²/W) et un frein vapeur a été installé afin de réguler l’humidité dans l’isolant. Cette étanchéité à l’air de la toiture est essentielle pour le bon maintien de la ouate de cellulose (épaisseur et densité) dans les combles perdus afin d’éviter l’apparition de ponts thermiques.

Plancher intermédiaires

Le plancher existant a été démoli et remplacé par une mezzanine en douglas donnant sur la salle de restauration du rez-de-chaussée.

Il est idéalement situé au niveau de la grande baie vitrée de la façade sud, cette dernière permettant d’augmenter les apports en lumière naturelle et de maximiser l’éclairage naturel de l’espace situé à l’étage.

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Figure 20 : Vue sur la mezzanine en douglas (source : Marc Mesplié)

 

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Figure 21 : Parquet à coupe perdue en chêne et châtaignier
(source : Barthélémy Dumons)

 

Plancher bas

Une dalle en béton surmontée de béton quartzé (composée de quartz, un silicate minéral qui offre une grande résistance mécanique au matériau et un aspect décoratif) a été posée, en enrobage du chauffage par le sol.

 

Menuiserie

Sur la partie principale du bâtiment, les volets et les encadrements des ouvertures ont été refaits à l’identique en respectant le nuancier local[1] . La porte d’entrée avec une imposte vitrée ainsi que les fenêtres ont été réalisées à neuf en respectant les proportions et la disposition des ouvertures sur la façade est. Cela permet de conserver l’intégralité patrimoniale de la façade située en bordure de la place.

Les fenêtres ont été remplacées par des menuiseries en bois avec un double vitrage. Elles présentent un coefficient de transmission thermique Uw de 1,9 W/m².K et ont été fabriquées en chêne local, débité sur la place du village. Par ailleurs, le prolongement des ébrasements obliques au niveau des ouvertures, réalisé lors des travaux d’isolation des parois, facilite la pénétration de la lumière naturelle.

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Figure 22 : Vue sur les menuiseries neuves en chêne

La création d’une grande ouverture vitrée sur la façade orientée sud, donnant sur la cour, permet de bénéficier
des apports solaires et lumineux filtrés par un brise-soleil en bois (douglas et mélèze) en été mais qui laisse pénétrer le soleil en hiver.
Des toiles tendues sur la pergola assurent également la protection des rayonnements directs.

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Figure 23 : Schéma figurant le rayonnement solaire selon les saisons – Guide « Isoler, rénover, valoriser » - CAUE 09

 

[1] https://www.parc-pyrenees-ariegeoises.fr/wp-content/uploads/2016/07/Barguillere_facades_webcomp.pdf

 

Aménagement intérieur 

Les équipements et aménagements existants ont été déposés afin d’assainir l’intérieur de la bâtisse. Les aménagements intérieurs ont été refaits avec différentes essences de bois : 

  • Escalier en châtaignier
  • Parquet en châtaigner et pin douglas
  • Bar en frêne et merisier
  • Porte du bar en chêne
  • Les autres aménagements sont en douglas

La surface totale, du fait de l’extension, évolue des 165,5m² initiaux à une surface utile de 210m².

 

 

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Figure 24 : Vue du rez-de-chaussée (source : Marc Mesplié)

 

Chauffage et eau chaude sanitaire (ECS)

Le chauffage est produit par une chaudière bois, avec des rendements atteints de l’ordre de 80 % à 90 %. Grâce au circuit court et à la grande production de bois de chauffage en Ariège, l’énergie dépensée reste très faible et permet la contribution à l’essor de cette filière économique sur l’ensemble du département. Le chauffage du rez-de-chaussée se fait par le sol tandis que l’étage est chauffé grâce aux équipements de la cuisine.

La chaudière sélectionnée possède une puissance nominale de 30 kW, et est située dans la chaufferie présente dans un bâtiment annexe.

L’eau chaude sanitaire (ECS) provient principalement des calories récupérées par des panneaux solaires thermiques, la commune bénéficiant de 1936 heures d’ensoleillement annuel. La chaudière vient en complément lorsque l’ensoleillement devient trop faible.

La gestion de l’eau a été optimisée grâce à un régulateur de débit posé sur la robinetterie et une sensibilisation du personnel (et des usagers) aux enjeux environnementaux liés à l’économie de l’eau.

Un récupérateur d’eau de pluie a été installé afin de la réutiliser pour le nettoyage des locaux et l’alimentation des chasses d’eau, tout en valorisant des cuves déjà existantes.

 

Ventilation 

La VMC double flux a été écartée pour des raisons de coût d’installation et d’entretien, les filtres devant être remplacés régulièrement. Une VMC simple hygro B a donc été sélectionnée afin de réguler les flux d’air d’entrée et de sortie en fonction de l’humidité ambiante mesurée dans une région à forte hygrométrie (entre 65 % et 80 %).

La régulation automatique de la ventilation permet un meilleur contrôle de l’humidité, ce qui implique des déperditions de chaleur plus faibles et donc un gain thermique important. Les entrées d’air sont situées sur les menuiseries.

Seule la salle de réunion située à l’étage est équipée d’une CTA double flux.

Les systèmes de CTA et de VMC ont été placés dans les combles.

 

Problématiques transversales

Ponts Thermiques

Nous n’avons pas d’informations issues de mesures ou de simulations.

Gestion des transferts d’humidité 

Afin de ne pas perturber les transferts d’humidité dans les parois en pierre, le maître d’œuvre a opté pour des matériaux avec une perméabilité à la vapeur élevée comme :

  • Des enduits perméables à la vapeur d’eau en extérieur et en intérieur, à base de chaux, chaux-chanvre et de plâtre.
  • Des isolants perméables à la vapeur d’eau (laine de bois, ouate de cellulose) avec la mise en œuvre d’un frein-vapeur.
  • Des matériaux de remplissage isolant (paille) pour l’extension.
  • Des panneaux OSB, de gypse ou de plâtre.
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Figure 25  : Vue du bâtiment depuis la place de l'église après les travaux (source : L'Estanquet de Pailhès)

Bilan de la réhabilitation

Consommations et confort thermique après travaux 

La grande ouverture de la façade sud et la mise en valeur de celles déjà existantes permet un éclairage naturel des grands volumes intérieurs. Ainsi les deux salles de restaurations ne nécessitent que peu d’éclairage électrique supplémentaire lors des journées ensoleillées. Afin d’obtenir une température intérieure agréable lors des périodes estivales à fort rayonnement solaire, une protection solaire a été installée au-dessus de la baie interrompant les rayons directs et évitant les surchauffes estivales.

Un suivi des consommations par poste, combiné à des ampoules à LEDs et une suppression des mises en veille des équipements non indispensables permet une économie d’énergie non négligeable.

Il est difficile de calculer la consommation actuelle car la source d’énergie primaire utilisée pour le chauffage est le bois sous forme de bûche, fourni gratuitement par la commune pour plusieurs années. Or, la chaufferie utilisée ne fournit pas de l’énergie exclusivement au bistrot de Pailhès, mais aussi à d’autres locaux de la commune, et les compteurs de consommation ne sont pas séparés.

 

Reconnaissances obtenues 

Le bistrot de pays de Pailhès a obtenu le label Haute Performance Énergétique qui récompense une réduction des consommations d’énergie primaire de 10 % par rapport au niveau de la RT2012.

Le projet a reçu un prix « Bois Construction » avec la mention spéciale « Développement local » de la part de la région Occitanie.

 

Bilan financier 

 

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Figure 26 : Bilan financier des travaux HT (source : Commune de Pailhès)

 

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Figure 27 : Bilan financier des prestations intellectuelles HT (source : Commune de Pailhès)

La TVA appliquée pour ce projet est de 20%, menant ainsi à un budget total de 442 595,75 € TTC, soit 2108 €/m² TTC.

 

Difficultés rencontrées

Une des principales complexités du projet est liée à la volonté d’utiliser des matériaux biosourcés issus des ressources locales. Pour avoir recours au bois local, il a été nécessaire de réaliser un état des lieux de la ressource, d’évaluer sa qualité et les volumes disponibles, puis d’adopter l’allotissement dans le cadre d’un marché public comme précisé précédemment. Concernant les bottes de paille utilisées pour l’isolation des murs de l’extension, celles doivent être de forme rectangulaire. Or, celles fournies par les paysans locaux étaient rondes. Il a donc été nécessaire pour le maitre d’œuvre de trouver une ancienne moissonneuse-batteuse permettant la création de bottes rectangulaires. L’aboutissement d’un tel projet nécessite une implication exceptionnelle du maître d’ouvrage et du maître d’œuvre. Le soutien et la motivation des différents acteurs ainsi que l’excellente coordination entre les fournisseurs et les différents artisans ont permis à ce projet d’aboutir et de démontrer qu’une opération de réhabilitation lourde avec des matériaux biosourcés locaux est possible !

 

 

 

Maîtrise d’ouvrage :  Commune de Pailhès
Maîtrise d’œuvre : Barthélémy Dumons, architecte – SARL Architecture et Paysage
Consommation énergétique :
 

  Avant travaux : inconnue

  Après travaux90 kWh/m²/an

 

   

Rédacteur de la fiche : Yannis PALMADE (Cerema Sud-Ouest)
Relecture : Anissa BEN YAHMED (Cerema Est), Nathalie PRAT (ENSA Toulouse)
Crédit photo : Barthélémy DUMONS (l'architecte), Marc MESPLIE, CAUE 09 et l'Estanquet de Pailhès


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Pailhès (09) - Réhabilitation engagée d'une maison de village du XIXe siècle en bistrot de pays

pour en savoir plus

Cette fiche a été réalisée dans le cadre du projet CREBA – Centre de REssources pour la réhabilitation responsable du Bâti Ancien, soutenu par le Programme ministériel d’Action pour la qualité de la Construction et la Transition Energétique (PACTE). Il est piloté par le Cerema aux côtés de 4 partenaires : l’école des Arts et Métiers Paris Tech, le Laboratoire de Recherche en Architecture de l’ENSA de Toulouse, les associations nationales Maisons Paysannes de France et Sites et Cités Remarquables de France.